Tracé tourné monochrome jaune, 2013, crayon sur papier.

Pour avoir une idée de ce qu’est le temps dans l’art, on a créé des nouveaux langages plastiques, des théories esthétiques et même de représentations qui transforment la notion du temps qu’on connaît. Dans la philosophie, il y a eu beaucoup de formes et de façons de reproduire cette idée : en parlant de l’instant, du présent, de la durée ou d’un moment. Dans l’œuvre de Carmen Perrin, le temps est présenté comme un ensemble de forces et de résistances avec différents matériaux qui font corps.

Dans sa pratique artistique, Carmen Perrin s’est livrée à l’usage délibéré de matériaux industriels tel que le caoutchouc, la fibre de verre, l’acier, le bois, ainsi que des résidus provenant du monde industriel. Au début de sa carrière, dans les années 1980, elle travailla avec tous ces matériaux pour créer des sculptures qui ressemblent plutôt à des inventions avec une utilité difficile à décrire, mais facile à contempler. Mais de quelle façon un ensemble de matériaux industriels peut-il donner au spectateur du plaisir ? Si certains disent que l’art ne sert qu’à être vu dans une salle d’exposition, alors, comment être intéressé par des œuvres faites avec ce qui peut être une pièce de voiture ou le dos d’une chaise ?

Abîme, 2013, verre et bougies.

Abîme, 2013, verre et bougies.

D’aucuns disent aussi que la valeur d’une œuvre d’art est plus importante quand on connaît la valeur que son créateur lui donne. C. Perrin parle de construire des œuvres non autoritaires et qui rendent possible l’expérience du temps grâce à la perception de l’objet et la sensation de l’espace. Cependant, ce temps va se construire chez le spectateur à partir de plusieurs énigmes : comment Carmen Perrin a réussi à relier des éléments différents qui créent des formes si complexes ? Combien de temps cela lui a pris ? Est-ce que son œuvre va durer dans le temps ? Certaines de ses œuvres ne vont durer que le temps d’une exposition.

Mon travail, c'est de résister au dressage de l'oeil.

Carmen Perrin

Les sculptures de C. Perrin sont harmonieuses et complexes. La forme et le mouvement statique de certaines dévoilent le rapport proche que l’artiste a avec l’architecture. Pour l’artiste, chacune de ses œuvres est un moment éphémère qui est lié à l’œuvre précédente et à l’œuvre à venir. C’est pour cela que la forme de l’œuvre n’est jamais achevée. À ce stade, on pourrait dire que ce travail est un présent qui est dans l’espace, c’est-à-dire que l’œuvre devient un espace intermédiaire entre ce qui existe déjà et ce qui n’existe pas encore. Si on parle du temps, cet espace intermédiaire serait le milieu où sa création devient quelque chose de vivant. En résumé, la présence physique de l’œuvre permet d’unir l’artiste avec le spectateur.

Les influences dans l’œuvre de cette artiste helvético-bolivienne viennent de l’Arte Povera, du minimalisme, du Land Art, de la performance, de la danse, de l’architecture, du cinéma et de la philosophie. Dans son travail, le cercle s’impose comme une forme élémentaire en révélant toutes les manières possibles de la travailler à partir du matériel, de la force et de la résistance. Carmen Perrin est une chercheuse de nouveaux matériaux. Cette recherche lui a permis de créer des nouvelles formes grâce à « la mise en relation des résistances » et à l’ « interaction de forces », dont elle parle si souvent dans son discours esthétique.

Entrer dehors sortir dedans, 2012, installation éphémère, 30 portes Bruno Taut, Berlin, caoutchouc mousse, verre.

Entrer dehors sortir dedans, 2012, installation éphémère, 30 portes Bruno Taut, Berlin, caoutchouc mousse, verre.

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