Peuple de la Terre et Résistants légendaires

Les Mapuches, littéralement « Peuple de la Terre » (en Mapudungún « Mapu » = la terre et « Che » = les gens), s’étendaient autrefois sur toute la région sud du continent. Précipitée par l’arrivée des colons espagnols et les massacres orchestrés sur leurs terres à partir du XVIème siècle, la diminution du territoire Mapuche au fil des années est sans égal. Ce dernier s’établit aujourd’hui en Araucanie sur une région bien plus restreinte, entre le Chili et l’Argentine. Toutefois, leur résistance est légendaire. Tout d’abord en refusant la servitude Inca puis celle des colons espagnols par la suite, ils devinrent le seul peuple d’Amérique à stopper la conquête ibérique et obtenir certaines garanties pour le respect de leurs droits fondamentaux, comme l’atteste le pacte de Quillin (1641).

Véritables protecteurs de la nature, les Mapuches sont liés à la Terre Mère ou « Nuke Mapu » de façon immuable. Autrefois, le « Mapu » était rempli d’arbres millénaires immenses qui protégeaient et nourrissaient ses bienfaiteurs. Mais les différentes exploitations de pins et d’eucalyptus, plus rentables aux yeux de l’entrepreneur chilien, ont causé en l’espace d’un siècle une extermination massive d’arbres ancestraux, détruisant au passage le paysage et la fertilité du Mapu. Dévoreuses d’eau, ses nouvelles plantations forestières ont détruit l’écosystème en asséchant les puits et les rivières, faisant fuir la faune et la flore.

À gauche : Don Alfonso, professeur de Mapudungún. À droite : Elisabeth, professeure de médecine traditionnelle. À gauche : Don Alfonso, professeur de Mapudungún. À droite : Elisabeth, professeure de médecine traditionnelle.
À gauche : Don Alfonso, professeur de Mapudungún. À droite : Elisabeth, professeure de médecine traditionnelle. À gauche : Don Alfonso, professeur de Mapudungún. À droite : Elisabeth, professeure de médecine traditionnelle.

La Médecine naturelle

Si le peuple Mapuche place la nature et ses bienfaits au centre de sa philosophie de vie, il a su par là même développer une médecine par les plantes pour le corps et assainir l’esprit : le « Lawen », aussi efficace que varié (maux de tête, de ventre, shampoing, stimulant du lait maternel).

Symboles et Mysticisme

La ruka

Cette nation ancestrale, ou « Wall Mapu », possède une histoire de plusieurs milliers d’années transmise de génération en génération uniquement par voie orale lors des cérémonies organisées dans la « ruka », maison traditionnelle Mapuche qui est à la fois le lieu de résidence familiale et un centre de rencontres pour la communauté.

Les quatre éléments

Ce chiffre 4, nous le retrouvons sur d’autres thématiques fondatrices de la culture comme le nombre de saisons, de points cardinaux sur Terre ou de membres créateurs du peuple Mapuche : Kuze, Fucha, Ulcha et Weche. Véritable expression de l’équilibre des forces du monde Mapuche, les quatre éléments détiennent une place centrale dans la culture Mapuche : la terre, l’eau, l’air et le feu.

À gauche : ruka Mapuche. À droite : drapeau Mapuche. À gauche : ruka Mapuche. À droite : drapeau Mapuche.

Croyances Mapuches

Elles sont fondées sur le culte de « Pillan », esprit des Ancêtres, et de « Ngen », esprit et éléments de la Nature. Les Mapuches sont ainsi indissociables de la Terre, des Animaux et de la Nature qu’ils considèrent comme sacrés.

Figures Mapuches

L’organisation sociale s’articule principalement autour du « Longko » (chef de village), du « Machi » (chaman), et des « Ngenpin » (autorités religieuses), figures les plus importantes de la culture.

Le Machi joue un rôle prépondérant pour soigner les maladies, appeler à une bonne récolte et protéger le bétail. Connaisseur savant des plantes médicinales, il est aussi le médiateur entre le monde naturel et surnaturel. Le processus d’apprentissage du Machi s’exerce au travers de visions l’amenant à rentrer en contact avec le monde des esprits grâce auquel il assimilera sa vocation. Par connexion avec le monde de l’invisible et aux côtés d’autres Machis plus expérimentés, il va forger son savoir durant de longues années.

Pour diagnostiquer les problèmes de ces patients, il pratique d’abord l’analyse urinaire pour prescrire ensuite un mélange à base de plantes. Si le mal est plus profond, sous l’emprise d’un mauvais esprit par exemple, le Machi regroupe les forces solidaires pour extraire l’esprit malvenu du corps du malade lors d’une cérémonie transcendantale.

« De 1866 à 1927, les Mapuches ont été relégués sur 5 000 km² de réserves, soit à peine plus de 5 % de leur territoire d’origine. Un dépouillement qui s’accentuera au fil des décennies, notamment sous le régime de Pinochet. »

Conflit avec le Chili

Après une longue période de résistance maitrisée face à l’oppresseur espagnol, l’indépendance du Chili en 1810 n’apporte pas le calme, bien au contraire. Si les Chiliens se montrent prudents dans un premier temps, l’autoproclamation du Royaume d’Araucanie en 1860 par le Français Antoine de Tounens – souhaitant fonder un État pour le peuple Mapuche afin de résister à l’armée chilienne – met en alerte le gouvernement. Des campagnes militaires dites de « Pacification d’Araucanie » sont mises en place en 1880 et feront alors place à une guerre brutale tout au long du XIXème siècle.

Vers 1883, les Mapuches perdent leur liberté et leur territoire en faisant face à une armée chilienne professionnelle et puissante. Commence alors une campagne de violation constante des droits fondamentaux. Au moyen d’une politique d’éradication, de déracinement et d’assimilation forcés, l’État chilien continue le processus de colonisation et d’extermination des Mapuches.

Ainsi, de 1866 à 1927, les Mapuches ont été relégués sur 5 000 km² de réserves, soit à peine plus de 5 % de leur territoire d’origine. Un dépouillement qui s’accentuera au fil des décennies, notamment sous le régime de Pinochet, qui favorisa l’annexion des terres par de grandes entreprises forestières.

Les Mapuches représentent aujourd’hui 10 % de la population adulte du Chili. Les restrictions imposées sur leurs droits de propriété et l’appauvrissement ont été à l’origine d’un exode rural massif.

 

Après 135 années d’afflux vers les villes, le plus souvent sous la forme d’un déplacement forcé, la moitié de cette communauté s’est concentrée à Santiago, où un habitant sur dix est Mapuche. Pourtant, plus ou moins consciemment, la mentalité collective chilienne continue de les percevoir au travers de stéréotypes qui font obstacles à leur insertion dans la société chilienne et les médias contribuent largement à entretenir une image négative des Mapuches.

Alors que le gouvernement chilien lui accorde pour la première fois un nouveau regard en créant des « zones de développements autochtones » liées à la propriété des terres, ces propositions restent peu arrangeantes géographiquement et le statut de propriété assez vague. Ces propositions s’intègrent toutefois dans une démarche positive, dont fait part également le développement récent du tourisme Mapuche. La situation des Mapuches, éternels combattants de la reconnaissance de leurs droits territoriaux et de leur autonomie, s’affiche comme un symbole des maux humains et écologiques de notre société. Toutefois, la reconnaissance des nations natives dans des pays frontaliers comme le Pérou ou la Bolivie nous laisse espérer que la situation Mapuche peut s’améliorer et que leur lutte ne sera pas vaine.

Plus d'infos

www.el-grito.org

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