Photo : Andrés Wolf

En cuisine la salsa (sauce) s’obtient à partir d’un mélange d’ingrédients. Dans la musique, la salsa utilise aussi plusieurs genres musicaux et familles d’instruments. Le caractère final de la « sauce » dépend de la qualité de chaque ingrédient et de l’équilibre de la préparation.

Nous parlons de « Our Latin Thing » pour décrire la particularité de la « sauce » latino-américaine, reconnue aux quatre coins du monde par son originalité et la façon si dansante dont elle accompagne les événements le plus festifs. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce curieux mélange musical n’est pas né en Amérique latine mais aux États Unis, à New York.

Aux côtés des communautés portoricaines, dominicaines et cubaines arrivées dans les années 1940, New York voit arriver des panaméens et des colombiens à partir des années 1960. Réunis pour la plupart dans les mêmes quartiers, ils forment une communauté très solide fortement liée par leurs racines culturelles et linguistiques. Sans le vouloir, ils finissent par créer « El Barrio Latino » (le quartier latino), un endroit parfait qui mélange les spécificités des régions hispanophones du continent américain.

Nid de création artistique, le Barrio Latino commence par produire une musique caribéenne dont le « son cubano » schématise sa colonne vertébrale. À l’image d’autres mouvements musicaux nés à cette époque (reggae, funk, punk, etc.), la Salsa devient un outil d’expression qui témoigne de la vie quotidienne des immigrés latino-américains dans la misère des États-Unis dans les années 1960 et 1970.  

Dès le début du XXème siècle, la musique latina « latin music » occupe une place importante sur la scène nord-américaine. Dans les années 1940 et depuis le Mexique, Dámaso Pérez Prado popularise le Mambo qui obtient un accueil extraordinaire aux États-Unis. À la même période, les orchestres type Big Band de Miguelito Valdez et les afrocubains Machito et Mario Bauza séduisent les oreilles d’une population nord-américaine plutôt aisée et désireuse d’avoir de beaux musiciens sur scène.

Photo : Daisy Thokora

Photo : Daisy Thokora

Comme l’explique l’écrivain vénézuélien César Miguel Rondón « c’était la période où le quartier donnait de la force et de l’authenticité mais jamais du prestige ». Cette dynamique continue pendant les années 1950 où Tito Puente, Tito Rodríguez et Machito se partagent le podium des orchestres les plus populaires, toujours habillés de costumes. La Havane profite de la vague massive de tourisme américain, les soirées y sont folles, les spectacles chics et l’argent partout.

Mais tout s’arrête brutalement dans les années 1960, avec l’arrivée de la pop des Beatles tandis que la révolution menée par Fidel Castro ferme les portes de Cuba. Les orchestres entrent en crise, les musiciens se retrouvent sans travail, et le Barrio Latino se marginalise progressivement.

Photo : Sebastián Orozco

Photo : Sebastián Orozco

La musique perd tout le glamour et l’élégance artificielle qui la caractérisait les décennies précédentes, les Big Bands deviennent impossibles à financer, de petits groupes se créent et composent dans une authenticité caractéristique du ghetto. Les jeunes s’initient sur des trombones désaccordés et tout le monde joue à sa sauce et avec ses origines. Les paroles ne sont ni plus ni moins que des histoires de quartier et la force des voix rappelle la violence de l’époque. C’est cette imperfection, cette authenticité, ce mélange de cultures marqué par le goût de la misère que l’on appellera Salsa quelques années plus tard.        

Formée au début des années 2000, La-33 est le fruit de cet héritage. Ce groupe colombien est marqué par une volonté de préserver un son original tout en le mélangeant intelligemment à d’autres genres populaires comme le rock, le ska ou le reggae. Leur musique a pour élément central la percussion du son cubano (clave, bongo et conga), le piano du son montuno et des cuivres qui invitent le danseur à rejoindre la piste accompagné d’un chant ou pregon que ne le laisse pas partir.

C’est exactement ce qui fait la différence entre la salsa de années 1990, plus douce, plus romantique, et la salsa brava connue dans le début de années 1970. Cette particularité de La-33 est reflétée dans le single phare « La Pantera Mambo » (reprise de La Panthère Rose d’Henri Mancini), ainsi que dans d’autres titres comme Quiereme Na’ma, Funky Bogaloo et Patacon Con Queso. La-33 fait la synthèse entre trois générations de salsa tout en revisitant intelligemment ce courant musical.

Photo : Andrés Wolf

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